La corruption et l’arbitrage saisis en demi-teinte par la Cour de cassation (Cass. civ. 1ère, 29 sept. 2021, n°19-19.769, cf. infra)
D. Mainguy, professeur à l’université de Paris I Panthéon Sorbonne
Résumé : Le juge ayant l’obligation de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis, doit être censuré l’arrêt d’appel ayant confirmé le rejet de l’exequatur d’une sentence arbitrale international en raison de sa contrariété à l’ordre public international du fait d’une corruption illicite présumée, sur le fondement de la transcription de l’audience arbitrale que l’arrêt d’appel a dénaturé.
L’arrêt censure l’appréciation d’un élément probatoire, sans tenir compte de l’ensemble des autres éléments de preuve ayant abouti, en appel à retenir les faits de corruption, ce qui pourrait laisser entendre que la conception maximaliste de la Cour d’appel de Paris impliquant la révision au fond n’est pas retenue, à ce stade par la Cour de cassation ou que celle-ci atteint ses limites dans le cadre d’une instance d’appel non équipée pour effectuer cet examen complet.
Commentaire.
Interminables affaires Alstom, au pluriel : l’arrêt du 29 septembre 2021 est une conséquence indirecte de l’accord conclu aux Etats-Unis en 2014 avec le Department of Justice américain (DoJ), conduisant à un monitoring sévère et une très grande prudence par Alstom dans le traitement des procédures subséquentes. Il est aussi une conséquence de la prise en compte, finalement assez récente, par le droit français de la question de la corruption d’agent public étranger, à la fois par une loi de 2001 introduisant les articles 433-1 et suivants, complétés depuis (Cf. V. Malabat, Droit pénal spécial, Dalloz, 9è éd. 2020, n°966), et la soi Sapin II du 9 décembre 2016, nationalisant les procédures, via d’’agence Nationale anticorruption, le parquet national financier et la possibilité de conclure des Conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP), dont l’affaire « Airbus », ayant donné lieu à une CJIP en janvier 2020 est l’exemple le plus saisissant (La suite sur MIRAGE).