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La vente d'un ordinateur avec logiciel préinstallé n'est pas une PCD?

Et si la Cour de cassation assurait une protection effective du consommateur (soyons fou)?

Voici un bel arrêt, appelé à une large audience (P+B+I) et par ailleurs lourdement motivé, ce qui, dans un autre registre, participe de la mue de la Cour de cassation.

Les faits sont simples, un consommateur achète un ordinateur dans lequel sont préinstallés un certain nombre de logiciels, ce pourquoi il demande ensuite le remboursement, du prix global, celui de ces logiciels. Débouté en appel, il fonde son pourvoi sur la combinaison des règles du Code de la consommation telle qu'elle résulte de la transposition de la direction du 11 mai 2005 sur les Pratiques commerciale déloyales à l'égard des consommateurs, et ce indépendamment de la recodification du Code de la consommation intervenue en 2016.

La pratique entre dans la catégorie des "ventes liées" ou "ventes subordonnées" au sens de l'article L.121-11 : 

(...) Est également interdit le fait de subordonner la vente d'un produit à l'achat d'une quantité imposée ou à l'achat concomitant d'un autre produit ou d'un autre service ainsi que de subordonner la prestation d'un service à celle d'un autre service ou à l'achat d'un produit dès lors que cette subordination constitue une pratique commerciale déloyale au sens de l'article L. 121-1".

Or l'article L. 121-1 du Code de la consommation s'inscrit comme un "chapeau" au Titre relatif aux "pratiques commerciales interdites et aux pratiques commerciales réglementées", les pratiques commerciales interdites se divisant entre les pratiques commerciales dites "déloyales", elles-mêmes divisées entre pratiques "trompeuses" et "agressives" et tout une série de pratiques identifiées (dont celles de l'article L. 121-11) :

"Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.
Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.
Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe
(...)."

L'ancien II de l'article L. 121-1 du Code de la consommation devenu L. 121-3, ajoute que :

"Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte.

Lorsque le moyen de communication utilisé impose des limites d'espace ou de temps, il y a lieu, pour apprécier si des informations substantielles ont été omises, de tenir compte de ces limites ainsi que de toute mesure prise par le professionnel pour mettre ces informations à la disposition du consommateur par d'autres moyens.

Dans toute communication commerciale constituant une invitation à l'achat et destinée au consommateur mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, sont considérées comme substantielles les informations suivantes :

1° Les caractéristiques principales du bien ou du service ;

2° L'adresse et l'identité du professionnel ;

3° Le prix toutes taxes comprises et les frais de livraison à la charge du consommateur, ou leur mode de calcul, s'ils ne peuvent être établis à l'avance ;

4° Les modalités de paiement, de livraison, d'exécution et de traitement des réclamations des consommateurs, dès lors qu'elles sont différentes de celles habituellement pratiquées dans le domaine d'activité professionnelle concerné ;

5° L'existence d'un droit de rétractation, si ce dernier est prévu par la loi".

Où l'on voit qu'une pratique dite déloyale ne l'est en réalité que lorsque elle répond à des conditions appelant interprétation par le juge, le fait qu'elle soit "contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur", conditions qui, on l'avouera, n'est guère propice à l'élimination de ces pratiques ex ante.

Elle l'est d'autant moins que, sur ce même sujet, la CJUE a considéré, le 7 septembre 2016 (C-310/15) qu'une telle pratique n'est pas, en soit, une pratique commerciale déloyale au sens de la directive de 2005 sauf à admettre la contrariété aux conditions rappelées dans l'article L. 121-6.

C'est le point de départ de la très longue motivation de l'arrêt :

Mais attendu, d’une part, que la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit (arrêt du 7 septembre 2016, C-310/15) qu’une pratique commerciale consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés sans possibilité pour le consommateur de se procurer le même modèle d’ordinateur non équipé de logiciels préinstallés ne constitue pas, en tant que telle, une pratique commerciale déloyale au sens de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, à moins qu’une telle pratique ne soit contraire aux exigences de la diligence professionnelle et n’altère ou ne soit susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen par rapport à ce produit ;

Que la diligence professionnelle est définie à l’article 2, sous h), de la directive 2005/29, comme désignant le niveau de compétence spécialisée et de soins dont le professionnel est raisonnablement censé faire preuve vis-à-vis du consommateur, conformément aux pratiques de marché honnêtes et/ou au principe général de bonne foi dans son domaine d’activité ;

Que l’altération substantielle du comportement économique des consommateurs est définie à l’article 2, sous e), de la directive 2005/29, comme étant la capacité d’une pratique commerciale à compromettre sensiblement l’aptitude du consommateur à prendre une décision en connaissance de cause et à l’amener, par conséquent, à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement ;

Attendu que la cour d’appel a examiné si la pratique commerciale en cause était déloyale en ce qu’elle était contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altérait ou était susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé à l’égard d’un bien ou d’un service, au sens de l’article L. 120-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, devenu L. 121-1 du même code en vertu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;

Qu’elle a, d’abord, constaté, s’agissant de la conformité de la pratique en cause aux exigences de la diligence professionnelle, qu’il ne pouvait être reproché à la société Sony de ne pas vendre séparément l’ordinateur nu et les logiciels, dans la mesure où son analyse du marché l’avait conduite, en toute bonne foi, à vendre un produit composite doté d’une configuration prête à l’emploi répondant aux attentes d’une part importante des consommateurs, lesquels préféraient disposer d’un produit unique préinstallé et d’utilisation immédiate plutôt que d’acheter séparément les divers éléments le composant et de procéder à une installation jugée difficile par un consommateur moyen ou, en tout cas, non souhaitée par celui-ci ; qu’elle a relevé, par motifs propres et adoptés, que M. X... avait été dûment informé de l’existence de logiciels préinstallés sur l’ordinateur qu’il avait acheté et des caractéristiques précises de chacun de ces logiciels ; qu’elle a ajouté que M. X... pouvait obtenir le remboursement de cet ordinateur s’il estimait qu’en définitive, l’appareil ne correspondait pas à ses attentes ;

Que la cour d’appel a, ensuite, s’agissant de l’existence ou du risque d’existence d’une altération substantielle du comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé à l’égard du bien considéré, estimé, par motifs propres et adoptés, que la circonstance que M. X... avait été dûment informé de l’existence de logiciels préinstallés sur l’ordinateur acheté et des caractéristiques précises de chacun de ces logiciels, lui permettant, comme tout autre consommateur, de faire un choix différent auprès d’autres professionnels en achetant un autre appareil vendu avec ou sans logiciels, témoignait également de l’absence d’une telle altération ;

Attendu qu’en l’état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que la pratique commerciale litigieuse n’est pas contraire aux exigences de la diligence professionnelle et n’altère pas ou n’est pas susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen à l’égard de ce produit, la cour d’appel a décidé à bon droit que la pratique commerciale en cause n’était pas déloyale ;

Et attendu, d’autre part, qu’il résulte de l’article L. 121-1, II, du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, devenu L. 121-3, en vertu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, qu’une pratique commerciale est trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle omet une information substantielle ; qu’il ressort du 3°) du même article que sont considérées comme substantielles les informations relatives au prix toutes taxes comprises et aux frais de livraison à la charge du consommateur, ou à leur mode de calcul, s’ils ne peuvent être établis à l’avance ;

Attendu que, par le même arrêt du 7 septembre 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit qu’il ressort du libellé de l’article 7, paragraphe 4, sous c), de la directive 2005/29, dont l’article L. 121-1, II, 3°) du code précité, devenu L. 121-3, 3°), en vertu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, est la transposition en droit interne, qu’est considéré comme une information substantielle le prix d’un produit proposé à la vente, c’est-à-dire le prix global du produit, et non le prix de chacun de ses éléments, et qu’il en découle que cette disposition fait obligation au professionnel d’indiquer au consommateur le seul prix global du produit concerné ; qu’elle ajoute que, conformément au considérant 14 de la directive 2005/29, constitue une information substantielle une information clé dont le consommateur a besoin pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause ; que, selon la Cour de justice, il résulte de l’article 7, paragraphe 1, de la même directive que le caractère substantiel d’une information doit être apprécié en fonction du contexte dans lequel s’inscrit la pratique commerciale en cause et compte tenu de toutes ses caractéristiques ; qu’eu égard au contexte d’une offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, l’absence d’indication du prix de chacun de ces logiciels n’est ni de nature à empêcher le consommateur de prendre une décision commerciale en connaissance de cause ni susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement ; que, par suite, le prix de chacun des logiciels ne constitue pas une information substantielle au sens de l’article 7, paragraphe 4, de la directive 2005/29 ; que la Cour de justice en a déduit que, lors d’une offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, l’absence d’indication du prix de chacun de ces logiciels ne constitue pas une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article 5, paragraphe 4, sous a), et de l’article 7 de la directive 2005/29 ;

Attendu qu’après avoir constaté que le caractère composite du produit proposé à la vente n’imposait pas à la société Sony de détailler le coût de chacun de ses éléments, le consommateur moyen pouvant se déterminer en fonction du prix unitaire de l’ordinateur, qu’il était en mesure de comparer à des produits concurrents, dès lors qu’il connaissait les types de logiciels qui avaient été préinstallés, la cour d’appel en a exactement déduit que la pratique commerciale en cause n’était pas trompeuse ;

Si on résume alors, la pratique est valable au sens de l'article L. 121-1 puisque le Vendeur avait réalisé une "analyse de marché" qui l'avait conduite "en toute bonne foi", à vendre un tel produit composite (diligence professionnelle donc), et que les consommateurs ont été informés (pas d'altération du comportement économique) et, s'agissant de savoir si l'information sur le prix dans les conditions de l'article L. 121-3, 3°, il n'impose pas une communication du prix de chaque élément, mais simplement du prix global.

Si on devait résumer l'arrêt à son dernier paragraphe : " Attendu qu’après avoir constaté que le caractère composite du produit proposé à la vente n’imposait pas à la société Sony de détailler le coût de chacun de ses éléments, le consommateur moyen pouvant se déterminer en fonction du prix unitaire de l’ordinateur, qu’il était en mesure de comparer à des produits concurrents, dès lors qu’il connaissait les types de logiciels qui avaient été préinstallés, la cour d’appel en a exactement déduit que la pratique commerciale en cause n’était pas trompeuse", on pourrait considérer qu'il s'agit d'un arrêt d'espèce : dans le cas particulier de la vente d'un ordinateur avec des logiciels préinstallés (et encore il faudrait savoir lesquels à quel coût réel, etc.), le consommateur "moyen" peut se déterminer librement, on pourrait ou louer ou critiquer l'arrêt, comme un arrêt d'espèce. Le problème, du point de vue d'un objectif de protection du consommateur, tient au fait que l'arrêt n'est pas un arrêt d'espèce, mais un arrêt qui se présente sinon comme un arrêt de principe du moins comme un arrêt à large diffusion et fournit un signal qui ne s'inscrit comme participant d'une interprétation favorable de la loi en considération des intérêts du consommateur, dans l'esprit, d'ailleurs, de la nouvelle donne de la "protection" des consommateurs de la CJUE. C'est dommage...

D. Mainguy

 

Cass. civ. 1ère 14 décembre 2016 n°14-11.437

Rejet

Protection des consommateurs ; Union Européenne

Demandeur (s) : M. Vincent X...

Défendeur (s) : société Sony Europe Limited


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 5 novembre 2013), que, le 27 décembre 2008, M. X... a acheté un ordinateur de marque Sony équipé de logiciels préinstallés ; qu’ayant vainement demandé à la société Sony Europe Limited le remboursement de la partie du prix de l’ordinateur correspondant au coût des logiciels, M. X... a assigné celle-ci en paiement ;

Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que constitue une pratique commerciale déloyale le fait de subordonner la vente d’un bien à l’achat concomitant d’un autre bien ; que le fait pour un fabricant d’ordinateur de ne permettre l’achat d’un ordinateur spécifique qu’à la condition que le consommateur achète de façon concomitante des logiciels préinstallés sans lui permettre d’acquérir ce même ordinateur nu constitue une telle pratique déloyale ; qu’en l’espèce, il est constant que M. X... a choisi un ordinateur de modèle VAIO VGN-NR38E en raison des fonctionnalités spécifiques de cet appareil ; qu’il était fait valoir par M. X... qu’il ne pouvait acheter un ordinateur de ce type Sony VAIO VGN-NR38E que muni des logiciels litigieux préinstallés ; qu’en considérant qu’il n’y avait pas de pratique commerciale déloyale aux motifs erronés que « M. X... pouvait exercer son choix en s’adressant à d’autres fabricants et en achetant un autre matériel d’une autre marque vendu sans logiciels ou associé à d’autres logiciels, le marché offrant une variété d’ordinateurs et de logiciels dont la combinaison permettait d’assurer la liberté de son choix. (…) que la vente pratiquée par la société Sony n’altérait donc pas substantiellement le comportement économique de M. X..., dans la mesure où ce dernier restait libre de décider d’acheter sur le marché auprès d’un autre fabricant, un autre produit, différemment composé et utilisant d’autres logiciels et qu’il pouvait se faire rembourser l’appareil acquis s’il s’apercevait qu’en définitive il ne correspond pas à ce qu’il souhaitait. Il ne peut être reproché à la société Sony de ne pas vendre séparément l’ordinateur nu et les logiciels dans la mesure où son analyse du marché l’a conduite en toute bonne foi à présenter une gamme de produits qu’elle estime correspondre à une part de la demande de la clientèle préférant un produit pré-installé d’utilisation immédiate à une vente séparée et un assemblage jugé délicat voire indésirable pour le consommateur moyen, part de marché occupée par d’autres concurrents. Sa décision de vendre « clés en main » un produit composite avec une configuration « prêt à l’emploi" répond aux attentes d’une grande partie des consommateurs souhaitant disposer d’un produit unique et à la configuration d’un marché assurant une variété d’offres suffisantes. La pratique dénoncée n’est donc pas contraire aux exigences de la diligence professionnelle », la cour d’appel a violé les articles L. 120-1 et L. 122-1 du code de la consommation, interprétés à la lumière de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;

2°/ que constitue une pratique commerciale déloyale le fait de subordonner la vente d’un bien à l’achat concomitant d’un autre bien ; que le fait pour un fabricant d’ordinateur de ne permettre l’achat d’un ordinateur spécifique qu’à la condition que le consommateur achète de façon concomitante des logiciels préinstallés sans lui permettre d’acquérir ce même ordinateur nu constitue une telle pratique déloyale ; qu’il est constant, en l’espèce, que le contrat de licence utilisateur final (CLUF) du système d’exploitation a affiché à l’écran le message suivant lors du premier démarrage de l’ordinateur : « En utilisant le logiciel, vous acceptez ces termes. Si vous ne les acceptez pas, n’utilisez pas le logiciel et contactez le fabricant ou l’installateur afin de connaître leurs modalités de retour des marchandises pour obtenir un remboursement ou un avoir » ; que M. X... n’a cependant pas eu d’autre choix, sans pouvoir opter pour d’autres logiciels, gratuits et plus adaptés à ses besoins, que d’accepter les logiciels litigieux sauf à ce que la vente de l’ordinateur elle-même soit annulée ; qu’en disant, cependant, qu’il n’y avait pas pratique déloyale aux motifs que M. X... avait été informé de l’existence des logiciels litigieux sur l’ordinateur, la cour d’appel a violé les articles L. 120-1 et L. 122-1 du code de la consommation, interprétés à la lumière de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, ensemble l’article 1134 du code civil ;

3°/ que constitue une pratique déloyale la pratique qui « repose sur des indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur » qui portent notamment sur les « caractéristiques essentielles » des biens et des services, à savoir « ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l’usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation », « le prix ou le mode de calcul du prix. » ; qu’en l’espèce, il est constant que le prix des logiciels n’a pas été communiqué à M. X... au moment de son achat ; qu’en considérant qu’il avait bénéficié d’une information suffisante aux motifs qu’il avait été informé de l’existence des logiciels litigieux lors de la vente et que « le caractère composite du produit offert n’implique pas à la charge de la société Sony de détailler le coût de chacun de ses éléments », la cour d’appel a violé les articles L. 111-1, L. 113-3, L. 120-1, L. 122-3 du code de la consommation ;

Mais attendu, d’une part, que la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit (arrêt du 7 septembre 2016, C-310/15) qu’une pratique commerciale consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés sans possibilité pour le consommateur de se procurer le même modèle d’ordinateur non équipé de logiciels préinstallés ne constitue pas, en tant que telle, une pratique commerciale déloyale au sens de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, à moins qu’une telle pratique ne soit contraire aux exigences de la diligence professionnelle et n’altère ou ne soit susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen par rapport à ce produit ;

Que la diligence professionnelle est définie à l’article 2, sous h), de la directive 2005/29, comme désignant le niveau de compétence spécialisée et de soins dont le professionnel est raisonnablement censé faire preuve vis-à-vis du consommateur, conformément aux pratiques de marché honnêtes et/ou au principe général de bonne foi dans son domaine d’activité ;

Que l’altération substantielle du comportement économique des consommateurs est définie à l’article 2, sous e), de la directive 2005/29, comme étant la capacité d’une pratique commerciale à compromettre sensiblement l’aptitude du consommateur à prendre une décision en connaissance de cause et à l’amener, par conséquent, à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement ;

Attendu que la cour d’appel a examiné si la pratique commerciale en cause était déloyale en ce qu’elle était contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altérait ou était susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé à l’égard d’un bien ou d’un service, au sens de l’article L. 120-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, devenu L. 121-1 du même code en vertu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;

Qu’elle a, d’abord, constaté, s’agissant de la conformité de la pratique en cause aux exigences de la diligence professionnelle, qu’il ne pouvait être reproché à la société Sony de ne pas vendre séparément l’ordinateur nu et les logiciels, dans la mesure où son analyse du marché l’avait conduite, en toute bonne foi, à vendre un produit composite doté d’une configuration prête à l’emploi répondant aux attentes d’une part importante des consommateurs, lesquels préféraient disposer d’un produit unique préinstallé et d’utilisation immédiate plutôt que d’acheter séparément les divers éléments le composant et de procéder à une installation jugée difficile par un consommateur moyen ou, en tout cas, non souhaitée par celui-ci ; qu’elle a relevé, par motifs propres et adoptés, que M. X... avait été dûment informé de l’existence de logiciels préinstallés sur l’ordinateur qu’il avait acheté et des caractéristiques précises de chacun de ces logiciels ; qu’elle a ajouté que M. X... pouvait obtenir le remboursement de cet ordinateur s’il estimait qu’en définitive, l’appareil ne correspondait pas à ses attentes ;

Que la cour d’appel a, ensuite, s’agissant de l’existence ou du risque d’existence d’une altération substantielle du comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé à l’égard du bien considéré, estimé, par motifs propres et adoptés, que la circonstance que M. X... avait été dûment informé de l’existence de logiciels préinstallés sur l’ordinateur acheté et des caractéristiques précises de chacun de ces logiciels, lui permettant, comme tout autre consommateur, de faire un choix différent auprès d’autres professionnels en achetant un autre appareil vendu avec ou sans logiciels, témoignait également de l’absence d’une telle altération ;

Attendu qu’en l’état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que la pratique commerciale litigieuse n’est pas contraire aux exigences de la diligence professionnelle et n’altère pas ou n’est pas susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen à l’égard de ce produit, la cour d’appel a décidé à bon droit que la pratique commerciale en cause n’était pas déloyale ;

Et attendu, d’autre part, qu’il résulte de l’article L. 121-1, II, du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, devenu L. 121-3, en vertu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, qu’une pratique commerciale est trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle omet une information substantielle ; qu’il ressort du 3°) du même article que sont considérées comme substantielles les informations relatives au prix toutes taxes comprises et aux frais de livraison à la charge du consommateur, ou à leur mode de calcul, s’ils ne peuvent être établis à l’avance ;

Attendu que, par le même arrêt du 7 septembre 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit qu’il ressort du libellé de l’article 7, paragraphe 4, sous c), de la directive 2005/29, dont l’article L. 121-1, II, 3°) du code précité, devenu L. 121-3, 3°), en vertu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, est la transposition en droit interne, qu’est considéré comme une information substantielle le prix d’un produit proposé à la vente, c’est-à-dire le prix global du produit, et non le prix de chacun de ses éléments, et qu’il en découle que cette disposition fait obligation au professionnel d’indiquer au consommateur le seul prix global du produit concerné ; qu’elle ajoute que, conformément au considérant 14 de la directive 2005/29, constitue une information substantielle une information clé dont le consommateur a besoin pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause ; que, selon la Cour de justice, il résulte de l’article 7, paragraphe 1, de la même directive que le caractère substantiel d’une information doit être apprécié en fonction du contexte dans lequel s’inscrit la pratique commerciale en cause et compte tenu de toutes ses caractéristiques ; qu’eu égard au contexte d’une offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, l’absence d’indication du prix de chacun de ces logiciels n’est ni de nature à empêcher le consommateur de prendre une décision commerciale en connaissance de cause ni susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement ; que, par suite, le prix de chacun des logiciels ne constitue pas une information substantielle au sens de l’article 7, paragraphe 4, de la directive 2005/29 ; que la Cour de justice en a déduit que, lors d’une offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, l’absence d’indication du prix de chacun de ces logiciels ne constitue pas une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article 5, paragraphe 4, sous a), et de l’article 7 de la directive 2005/29 ;

Attendu qu’après avoir constaté que le caractère composite du produit proposé à la vente n’imposait pas à la société Sony de détailler le coût de chacun de ses éléments, le consommateur moyen pouvant se déterminer en fonction du prix unitaire de l’ordinateur, qu’il était en mesure de comparer à des produits concurrents, dès lors qu’il connaissait les types de logiciels qui avaient été préinstallés, la cour d’appel en a exactement déduit que la pratique commerciale en cause n’était pas trompeuse ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Par ces motifs :

REJETTE le pourvoi ;


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