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320 8374183Avertissement

 

« Est-il besoin de préciser que ce roman est une œuvre de fiction même s’il se fond dans une trame historique dramatiquement réelle ? Toute ressemblance avec des personnages ayant véritablement existé ou des évènements qui se seraient vraiment déroulés serait donc purement fortuite, ou alors un coup de chance rare, hormis pour quelques salauds bien connus qui en ont été les acteurs maudits ».

 


« Inutile de préciser également que les droits d’auteurs sont protégés et appartiennent à Daniel Mainguy (© 2010) ».

 

  

« Cet ouvrage est publié sous forme de feuilleton, en ligne, en format .pdf ou html sur www.daniel-mainguy.fr».

 

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Ne pas reproduire sans autorisation : « frappe et on t’ouvrira ».


 



Le précédent, Chapitre 2


Chapitre 3

 





 

 

 

Et de deux!

 

Paris, 6 juin 1995,  9h00

 

3. Ibrahim s’engouffra dans le métro à la station Hôtel de Ville tandis que Morislav y était parvenu quelques minutes auparavant, juste à temps pour voir et entendre que la première mission d'Ibrahim était réussie.

Sans se manifester, il attendit qu'Ibrahim fût entré dans la station sans être apparemment inquiété ni suivi. Il constatait qu’il était calme, décidé, malgré ce qu’il venait d’accomplir, sans doute trop enivré par l’adrénaline, lui offrant un courage de martyr. Morislav lui-même ressentait ces picotements dans le ventre, cette joie sourde qui innervait les muscles de tout son corps. Séparés de quelques dizaines de mètres, ils suivirent les couloirs de la station, marchant d’un pas sûr, à force d’avoir parcouru ces dédales.

Un quart d'heure plus tard, Ibrahim, discrètement suivi de Morislav, émergeait de la station Porte Dauphine sur l’avenue Foch. Après un rapide tour d’horizon, il se dirigea vers la rue de la Faisanderie dans laquelle, cent mètres plus loin, le drapeau yougoslave flottait tranquillement au dessus du porche de l'ambassade de la République Socialiste de Yougoslavie, ou ce qu’il en restait. Ibrahim se contraint à marcher d’un pas régulier, ni trop rapide ni trop lent, en s'approchant d'une voiture garée à quelques mètres. De sa poche, il actionna la télécommande de la voiture et ouvrit la portière. Il s’assit au volant, saisit une enveloppe qu’il avait dissimulée la veille sous le siège avant et qu’il glissa rapidement sous son blouson. Il en sortit un pistolet muni d'un silencieux qu'il installa sous la ceinture de son pantalon, sur sa hanche. S’assurant d’un regard dans le rétroviseur que personne ne l’observait, il ressortit. Il referma la portière, s’assura que le pistolet était bien calé et n’allait pas glisser et continua son chemin, se rapprochant de l'ambassade.

Quelques personnes marchaient d'un pas alerte, se rendant sans doute à leur bureau. Une jeune femme poussait un landau d’où pendait des sacs revêtus des signes de grandes marques de luxe. Une autre tirait un sac à provision. La grande porte cochère de l'ambassade était à moins de cinquante mètres. Aucun gendarme n’en gardait l’extérieur, mais un service de sécurité verrouillait l’entrée à l’intérieur.

 

Un homme portant une petite serviette noire marchait dans le sens inverse de l’autre côté de la rue. Grand, chauve et maigre, le visage émacié et musculeux, tous les os du crâne se détachaient de son visage. En même temps, de cette figure assez repoussante se dégageait un air de supériorité trahi par un minuscule sourire et un port de tête très haut, sur une cravate rouge. Arrivé presque à hauteur de l’ambassade, il traversa prudemment la rue et emprunta le même trottoir qu’Ibrahim, de l’autre côté de la porte de l’ambassade. Ibrahim mit lentement la main dans son blouson, comme s’il cherchait son portefeuille. Lorsque l'homme fut à sa hauteur, presque devant l’ambassade, Ibrahim sortit brusquement son revolver et le brandit vers la tête de l'homme. Il tira. Deux fois. L'homme recula et tomba, les yeux ouverts, n'entendant pas la phrase qu'Ibrahim lui cria dans l’oreille déjà morte. Il lâcha le revolver dans une poubelle voisine et continua tranquillement son chemin en direction de la prochaine station de métro.

Une jeune femme qui accompagnait son fils vers une école voisine entendit un cri dans une langue qu’elle ne comprit pas et vit un homme s'écrouler. Elle s'approcha, pensant à un malaise alors que l'homme qu'elle avait entendu crier s'éloignait. Sans réfléchir, elle se pencha sur l'homme à terre, vit le sang couler à flot derrière son corps et s'évanouit. Déjà, les policiers de la sécurité de l'ambassade se dirigeaient vers eux, attirés par cette bizarre scène.

Ibrahim était déjà loin. Morislav le suivait.

 

 

*

 

Josip attendait près de la station Charles-De-Gaulle-Etoile, dans une Renault Espace garée sur l'avenue de Breteuil, garée en double file en direction de la porte de Saint-Cloud. Ibrahim puis Morislav surgirent à leur tour, l'un après l'autre, le dernier surveillant les arrières du premier. Zoran enfin, qui devait surveiller la sécurité du chemin d'évasion des deux premiers arriva quelques minutes plus tard. Il devait se manifester à la station de métro d'un signe convenu adressé à Ibrahim et Morislav. A défaut, ceux-ci devaient poursuivre leur chemin et descendre au terminus pour rejoindre Josip en un autre point de rendez-vous. Josip démarra et se dirigea vers Palaiseau où ils changèrent de voiture. Durant tout le chemin, les trois garçons racontèrent leurs exploits avec force détails, Ibrahim encore très énervé par l'intensité de l'action qu’il venait de vivre et la violence qu’il avait déclenchée.

Josip étaient intensément satisfait. Il les félicita et tous se congratulèrent en riant et en se donnant de grandes tapes amicales et joyeuses sur l'épaule. Ils purent rejoindre les quartiers nords de la banlieue parisienne, par un détour vers le sud de Paris, en espérant déjouer d'éventuels suiveurs particulièrement discrets, vers ses quartiers désertés par les français de souche au profit des communautés émigrées, maghrébines et africaines. La banlieue, la vraie. Un désert de béton. Avec ses indigènes, qui surgissaient de nulle part, comme dans les véritables déserts. Avec ses règles, fondées sur le besoin de survie, sur la solitude, sur quelques éclaircies tribales de solidarité, avec ses violences discrètes. Dans l'inconscient collectif du reste de la population, ces endroits dans lesquels la police n'entrait plus étaient réservés aux gangs et aux trafiquants de drogue, prêts à  inonder de mort blanche tous les collèges et lycées de Paris et sa ceinture. Josip profitait d'une autre triste réalité, celle d'hommes sans travail, sans racine, sans considération, sans honneur et livrés à eux mêmes. Parfois récupérés par le discours brillant, encourageant et enflammé de quelque imam fou de rage et de haine, invoquant une nouvelle Internationale pour justifier une prochaine terreur contre les innocents. Prêts à lancer ses ouailles contre une France jugée responsable de tous leurs maux et qui les avait pourtant accueillis, qui les nourrissait et souvent les protégeait. Leurs enfants eux-mêmes étaient recrutés pour le plus grand profit de réseaux clandestins qui commençaient à se structurer, camouflant parfois sous des dehors religieux et intransigeants, des crimes aux bénéfices immédiats et colossaux. Il suffisait de se promener dans ces quartiers pour se rendre compte de l'état d'esprit qui devait y régner. De grandes barres pouvant loger plusieurs centaines de foyers, plusieurs milliers de personnes, se suivaient en une gigantesque chenille triste au pied desquelles des parkings remplis de voitures pauvres et de carcasses parfois incendiées servaient de parcours d'éveil à des enfants livrés à eux-mêmes, à la rue, à la loi de la force. Des quelques rares bacs à sables qui avaient jadis été aménagés, il ne restait plus que les poteaux rouillés de ce qui avait été ici une balançoire, là un manège. Des arbres ridicules et grillagés témoignaient de la jeunesse de la prise en compte collective de la détresse de ces quartiers et rendaient compte a contrario de l'indifférence dans laquelle ils avaient été tenus pendant des années. Josip et ses amis se ruèrent dans un appartement qu'un cinquième bosniaque louait depuis plusieurs mois en profitant des réseaux islamistes souterrains du quartier dont il avait appris l’existence d’un jeune français d’origine algérienne qui les avaient rejoints en Bosnie.

 

Ils connectèrent un ordinateur portable sur Internet par la ligne téléphonique et envoyèrent rapidement un message discret pour le cas très improbable où il serait intercepté : « Cher Hussein, les deux oncles de nos voisins sont décédés récemment et brutalement. Tous nos cousins vont bien. Ton frère Josip qui t’embrasse».

 

 Ils se changèrent, récupérèrent des bagages déjà prêts, vérifièrent que leur poche contenait bien un billet d'avion pour la Turquie d'où ils pourraient repartir vers la Bosnie, et s'évanouirent définitivement du paysage policier français.

 

 

 

 

 

La suite, chapitre 4

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