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Chapitre 3
Et de deux!
Paris, 6 juin 1995, 9h00
3. Ibrahim s’engouffra dans le métro à la station Hôtel de Ville tandis que Morislav y était parvenu quelques minutes auparavant, juste à temps pour voir et entendre que la première mission d'Ibrahim était réussie.
Sans se manifester, il attendit qu'Ibrahim fût entré dans la station sans être apparemment inquiété ni suivi. Il constatait qu’il était calme, décidé, malgré ce qu’il venait d’accomplir, sans doute trop enivré par l’adrénaline, lui offrant un courage de martyr. Morislav lui-même ressentait ces picotements dans le ventre, cette joie sourde qui innervait les muscles de tout son corps. Séparés de quelques dizaines de mètres, ils suivirent les couloirs de la station, marchant d’un pas sûr, à force d’avoir parcouru ces dédales.
Un quart d'heure plus tard, Ibrahim, discrètement suivi de Morislav, émergeait de la station Porte Dauphine sur l’avenue Foch. Après un rapide tour d’horizon, il se dirigea vers la rue de la Faisanderie dans laquelle, cent mètres plus loin, le drapeau yougoslave flottait tranquillement au dessus du porche de l'ambassade de la République Socialiste de Yougoslavie, ou ce qu’il en restait. Ibrahim se contraint à marcher d’un pas régulier, ni trop rapide ni trop lent, en s'approchant d'une voiture garée à quelques mètres. De sa poche, il actionna la télécommande de la voiture et ouvrit la portière. Il s’assit au volant, saisit une enveloppe qu’il avait dissimulée la veille sous le siège avant et qu’il glissa rapidement sous son blouson. Il en sortit un pistolet muni d'un silencieux qu'il installa sous la ceinture de son pantalon, sur sa hanche. S’assurant d’un regard dans le rétroviseur que personne ne l’observait, il ressortit. Il referma la portière, s’assura que le pistolet était bien calé et n’allait pas glisser et continua son chemin, se rapprochant de l'ambassade.
Un homme portant une petite serviette noire marchait dans le sens inverse de l’autre côté de la rue. Grand, chauve et maigre, le visage émacié et musculeux, tous les os du crâne se détachaient de son visage. En même temps, de cette figure assez repoussante se dégageait un air de supériorité trahi par un minuscule sourire et un port de tête très haut, sur une cravate rouge. Arrivé presque à hauteur de l’ambassade, il traversa prudemment la rue et emprunta le même trottoir qu’Ibrahim, de l’autre côté de la porte de l’ambassade. Ibrahim mit lentement la main dans son blouson, comme s’il cherchait son portefeuille. Lorsque l'homme fut à sa hauteur, presque devant l’ambassade, Ibrahim sortit brusquement son revolver et le brandit vers la tête de l'homme. Il tira. Deux fois. L'homme recula et tomba, les yeux ouverts, n'entendant pas la phrase qu'Ibrahim lui cria dans l’oreille déjà morte. Il lâcha le revolver dans une poubelle voisine et continua tranquillement son chemin en direction de la prochaine station de métro.
Une jeune femme qui accompagnait son fils vers une école voisine entendit un cri dans une langue qu’elle ne comprit pas et vit un homme s'écrouler. Elle s'approcha, pensant à un malaise alors que l'homme qu'elle avait entendu crier s'éloignait. Sans réfléchir, elle se pencha sur l'homme à terre, vit le sang couler à flot derrière son corps et s'évanouit. Déjà, les policiers de la sécurité de l'ambassade se dirigeaient vers eux, attirés par cette bizarre scène.
Ibrahim était déjà loin. Morislav le suivait.
*
Josip attendait près de la station Charles-De-Gaulle-Etoile, dans une Renault Espace garée sur l'avenue de Breteuil, garée en double file en direction de la porte de Saint-Cloud. Ibrahim puis Morislav surgirent à leur tour, l'un après l'autre, le dernier surveillant les arrières du premier. Zoran enfin, qui devait surveiller la sécurité du chemin d'évasion des deux premiers arriva quelques minutes plus tard. Il devait se manifester à la station de métro d'un signe convenu adressé à Ibrahim et Morislav. A défaut, ceux-ci devaient poursuivre leur chemin et descendre au terminus pour rejoindre Josip en un autre point de rendez-vous. Josip démarra et se dirigea vers Palaiseau où ils changèrent de voiture. Durant tout le chemin, les trois garçons racontèrent leurs exploits avec force détails, Ibrahim encore très énervé par l'intensité de l'action qu’il venait de vivre et la violence qu’il avait déclenchée.
La suite, chapitre 4