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Avertissement

320 8374183« Est-il besoin de préciser que ce roman est une œuvre de fiction même s’il se fond dans une trame historique dramatiquement réelle ? Toute ressemblance avec des personnages ayant véritablement existé ou des évènements qui se seraient vraiment déroulés serait donc purement fortuite, ou alors un coup de chance rare, hormis pour quelques salauds bien connus qui en ont été les acteurs maudits ».

« Inutile de préciser également que les droits d’auteurs sont protégés et appartiennent à Daniel Mainguy (© 2010) ».


« Cet ouvrage est publié sous forme de feuilleton, en ligne, sur www.daniel-mainguy.fr» ou en format "classique".  

 

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Ne pas reproduire sans autorisation : « frappe et on t’ouvrira ».


 Chapitre 20

 

 

 

 

Le charnier

 

 

Srebrenica, 18 septembre 1995

 

21.          Le lendemain matin, tous les officiers et sous-officiers étaient rassemblés dans la salle de l'école pendant que les hommes préparaient les véhicules et le matériel. Sur le mur du fond de la salle, Rahya avait fixé la planche qui leur servaient également de table de salle à manger. Il avait espéré retrouver le tableau noir de la classe mais à sa place, on ne pouvait plus voir que les briques derrière le crépi arraché par les balles.

Rahya avait punaisé sur la planche une carte d'état major représentant Srebrenica et ses environs. Il avait soigneusement indiqué au crayon rouge les endroits où les spécialistes du renseignement estimaient que se situaient les charniers d'après les photos satellites qu’il avait également accrochées à côté. Lemercier se tenait devant la carte, indiquant quelques zones à ses chefs de section. Un capitaine de l’état major de Delouvrier, qui supervisait les équipes de fouilles, était arrivé tôt le matin de Zagreb. Il prit la parole.

— Je suis le capitaine Calvisson, de l’état major du général Delouvrier. J’ai la responsabilité des équipes de fouilles comme on les appelle, c’est-à-dire de repérage des charniers, et de la conduite des enquêteurs de l’ONU pour le compte du tribunal pénal international de La Haye et des équipes de médecins. Vous avez devant vous les photos prises par satellites et par des avions espions américains avant et après les massacres de Srebrenica et de ses alentours. Ce Tribunal pénal International pour l’ex-Yougoslavie est désormais constitué, contrairement à ce que beaucoup craignaient. Nous sommes chargés d’épauler le procureur en trouvant des preuves des crimes commis.

« A partir de ces photos, on a pu repérer six sites qu’on appelle des sites primaires. Ce n’est pas très délicat comme terme mais c’est tout ce qu’on a trouvé. Il s’agit des charniers creusés immédiatement après les exécutions et qui ont abrité les corps tout de suite après le massacre. On pense qu’ils contiennent à peu près  quatre mille corps de musulmans bosniaques. On compte aussi vingt-neuf sites secondaires, qui auraient été creusés ensuite de façon à disperser les corps. On a déjà visité quatre sites primaires et repéré dix-neuf sites secondaires. Nous allons aujourd’hui essayer de trouver un cinquième site primaire, le site de la Ferme de Branjevo. Un soldat croate qui a participé aux massacres s’est rendu aux enquêteurs et nous a indiqué l’endroit. Il a affirmé que plus de mille bosniaques y auraient été exécutés et enterrés. C’est le dernier site que nous visiterons avant que le froid s’installe. Nous reprendrons ce travail au printemps prochain.

Le capitaine Calvisson montra une série de photos prises d’un satellite. La première était datée du 6 juillet 1995 et ne révélait rien de particulier. Une seconde photo, datée du 17 juillet 1995 montrait des traces de bulldozer.

Lemercier s’approcha de la photo et l’examina. Il cherchait si une photo du 6 juillet en plan large avait été prise et s’ils figuraient sur cette photo. Lemercier n’oubliait pas qu’ils avaient reçu l’ordre de quitter les lieux alors qu’ils étaient sur les traces du commandant Hussein et qu’ils s’approchaient de Srebrenica où Hussein s’était peut-être réfugié.

Fayard retournait en tous sens plusieurs photos, semblant chercher quelque chose. Il se tourna vers Lemercier :

— C’est curieux, demanda-t-il, en tenant une photo datée du 13 juillet, tous ces petits points noirs sur ces photos. Regardez mon commandant, là, là et là, là encore, qu’est-ce c’est ? On dirait des fourmis.

— Des cadavres, Fayard, des cadavres, répondit Bonnard.

Le capitaine Calvisson s’était tu. Il ramassa la photo. Personne parmi les soldats pourtant aguerris pour la plupart ne trouvait à parler. Certains regardaient les photos fixement, en fronçant les sourcils. D’autres examinaient le bout le leurs chaussures. Le capitaine Calvisson semblait habitué à cet accueil.

Lemercier prit une quatrième photo datée du 27 juillet montrant la roche à vif et des tas de terre retournée parfaitement repérables, désignant le charnier sans équivoque possible. Une dernière photo datée du 21 août montrait la terre partiellement remuée par endroit, indiquant que l’on avait retiré des cadavres, comme sur une autre série de photos du charnier du Barrage de Petkovci. Lemercier jeta un œil à Marie. Le 21 août ils étaient encore en train de profiter de leur deux semaines d’échappée clandestine.

Rahya rompit le silence.

— Comment se fait-il qu’il n’y ait aucune photo des jours où les exécutions se sont déroulées, entre le 6 et le 20 juillet, à part celle que l’adjudant Fayard a dénichée ?

— Ecoutez, répondit Calvisson après un instant d’hésitation.

Personne, à part Rahya, n’avait fait le rapprochement. « C’est pourtant évident », songea Lemercier.

— Des observations ont dû être faites. Les combats lancés par les serbes ont commencé le 6 juillet, les hollandais ont dû faire des rapports. Les serbes sont entrés progressivement dans la ville qui a chuté définitivement le 11 juillet seulement après que les bosniaques ont tenté de se défendre, poursuivit-il à voix haute. On sait que les déportations ont commencé tout de suite, dès le 12 juillet et sans doute les exécutions se sont déroulées jusqu’au 20 juillet. Où sont ces photos ?

— Je ne vais pas vous raconter de salades, poursuivit Calvisson. Vous savez parfaitement que l’on a tous les moyens d’avoir ces photos. D’ailleurs, l’une d’entre elles m’avait échappé, celle que l’adjudant Fayard a manipulée tout à l’heure. Cela ne se reproduira plus. Posez la question aux enquêteurs demain, vous verrez. Je vous garantis la réponse : nous n’avons aucune photo en flagrant délit. Il y avait trop de risques pour d’éventuels otages. Ça, c’est la version livrée aux journalistes. Pourquoi ? Je l’ignore. Mais il est certain que des satellites sont passés au-dessus de ces zones entre le 6 et le 20 juillet. Je crois même savoir qu’il y avait une équipe de commandos du 13ème Dragon parachutiste pas loin. Trop peu nombreux, dix ou douze, pour intervenir mais bien assez et surtout bien assez entraînés pour rassembler des preuves. Il n’y a pas eu d’intervention, il n’y a pas eu de frappes aériennes, c’est clair. Il fallait protéger les casques bleus, ne pas les exposer. Il y avait aussi les deux cents otages que les serbes détenaient. C’est la doctrine officielle de l’ONU depuis le début du conflit. Vous savez bien que c’est pour cette raison que le mandat a été changé. Demain, quand la guerre sera finie, alors oui, on ressortira les photos pour punir les coupables. Mais pour l’instant ce sont des preuves tangibles qu’il nous faut. Personne ne souhaite que l’on se contente de photo dont il serait ensuite trop facile de discuter le caractère original.

— Vous savez, Calvisson, on était sur la zone, au nord ouest, à quelques kilomètres de Srebenica le 6 juillet 1995 au matin. Toute la compagnie. Et Delouvrier nous a donné l’ordre de faire demi tour.

Ce fut au tour de Calvisson d’accuser le coup cette fois. Il décida de changer de sujet. Marie baissa la tête. Lemercier évita de croiser son regard.

 

(...) 

 

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